L’obligation de sécurité de l’employeur à l’épreuve du Coronavirus

4 mai 2020

Les annonces gouvernementales ainsi que les déclarations des différents experts sont énonciateurs d’une reprise de l’activité économique, sous le prisme toujours présent du risque de contamination des salariés au Coronavirus.
Certains postes de travail sont affectés plus que d’autres en raison de l’absence de télétravail possible, vecteur de conséquences sur les conditions de travail des salariés.
A cet effet, il sera rappelé l’obligation de sécurité de l’employeur prévue à l’article L.4121-1 du Code du travail qui dispose que « l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs […]. L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes ».

Il ressort également de l’article L.4422-1 du Code du travail que «l’employeur prend des mesures de prévention visant à supprimer ou à réduire au minimum les risques résultant de l’exposition aux agents biologiques, conformément aux principes de prévention énoncés à l’article L. 4121-2 ».
Dès lors, l’employeur doit veiller au respect de la sécurité de ses salariés en prenant des dispositions nécessaires afin de respecter les mesures dites « barrières » afin de prévenir et de lutter contre la transmission du virus au sein de l’entreprise, en partenariat avec le service de santé au travail et le CSE.
A ce titre, l’employeur doit procéder à la modification de son document unique d’évaluation des risques afin d’ajouter des mesures sanitaires en cas d’épidémie et la mise en place d’une procédure pour les salariés contaminés ou susceptibles d’être porteurs en raison d’une exposition dans une zone à risque.
Par ailleurs, il doit veiller à la circulation de l’information auprès de l’ensemble de ses salariés concernant les mesures d’hygiène et de sécurité, les protocoles d’hygiène, la mise à disposition de matériel de protection, le respect de la distanciation sociale, la fréquence de nettoyage, la réorganisation et l’aménagement des postes, la signalisation, la formation adaptée, les risques psychosociaux.

Pour ce faire, le Ministère du Travail indiquait le 16 avril 2020 que l’employeur doit :
« – Procéder à l’évaluation des risques encourus sur les lieux de travail qui ne peuvent être évités en fonction de la nature du travail à effectuer ;
– Déterminer, en fonction de cette évaluation les mesures de prévention les plus pertinentes ;
– Associer à ce travail les représentants du personnel ;
– Solliciter lorsque cela est possible le service de médecine du travail qui a pour mission de conseiller les employeurs, les travailleurs et leurs représentants et, à ce titre, de préconiser toute information utile sur les mesures de protection efficaces, la mise en œuvre des gestes barrière ;
– Respecter et faire respecter les gestes barrière recommandés par les autorités sanitaires. »

Toujours dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus et en raison de son obligation de sécurité, l’employeur peut, si le salarié montre des symptômes laissant supposer un risque de Coronavirus, saisir le médecin du travail.
En outre, l’employeur doit prévoir un plan de continuité d’activité et veiller au respect des recommandations sanitaires et gouvernementales en les actualisant.

L’absence par le salarié de respect des consignes d’hygiène et de sécurité peut être vecteur d’une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement.

En tout état de cause, il sera rappelé que l’obligation de sécurité de l’employeur est une obligation dite de « moyen renforcé ». Ainsi, dans l’hypothèse d’une procédure contentieuse, il appartient à l’employeur de démontrer qu’il a pris toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité physique et mentale des salariés.
Dans le contexte épidémique actuel, le Tribunal Judiciaire, en référé, a commencé à se prononcer sur le respect ou non par l’employeur de son obligation de sécurité. En la matière, le Tribunal Judiciaire de Nanterre du 20 avril 2020 a condamné, en référé, la Société Amazon pour ne pas avoir suffisamment évalué les risques induits par le Covid-19 à l’égard de ses salariés, ni sollicité les représentants du personnel pour cette évaluation.

Dans le cadre des mesures à venir qui seront prises par le gouvernement ou par l’employeur, il conviendra de veiller au juste équilibre entre les mesures préventives et le respect notamment de la sphère privée, afin de veiller à ne pas porter atteinte aux libertés fondamentales.

Enfin, il est important de rappeler la lutte contre la propagation est l’affaire de tous, aussi bien l’employeur que le salarié dit « cas contact » ou contaminé, afin de veiller à ne pas exposer un autre salarié, que l’absence de respect des mesures sanitaires pourrait être constitutif du délit de mise en danger de la vie d’autrui (article 223-1 du Code pénal).