La défense pénale doit s’organiser autour de la procédure

2 septembre 2019

Il appartient à l’avocat de soulever des nullités et de faire fait écarter les procès-verbaux si la procédure n’a pas été respectée.

Deux personnes étaient poursuivies pour avoir soustrait frauduleusement divers objets, avec ces circonstances que les faits avaient été commis par effraction et en réunion.

Ils sont interpellés à 22h17 dans la cour intérieure de l’immeuble de l’un d’entre eux et immédiatement menottés. Les enquêteurs retournent alors chercher le témoin aux fins d’identification.

Les deux suspects sont présentés au témoin alors qu’ils attendent dans la rue, menottés et encadrés par des policiers.

Sans surprise, le témoin va les reconnaitre comme les auteurs du vol.

Une fois cette première « identification » réalisée, les policiers vont placer les auteurs présumés en garde à vue.

Devant le Tribunal Correctionnel, j’ai soulevé plusieurs nullités liées aux conditions d’interpellation qui sont strictement encadrées par le Code de procédure pénale.

En effet, l’article 78-2 du Code de procédure pénale précise les conditions dans lesquelles les policiers peuvent opérer une interpellation et un contrôle d’identité.

Au moment de leur interpellation, les suspects se trouvaient dans la cour intérieure de l’immeuble habité par l’un d’entre eux.

La Cour de Cassation a précisé : « le terme domicile au sens des articles 56 et 76 du Code de procédure pénale ne signifie pas seulement le lieu où une personne a son principal établissement mais encore le lieu où, qu’elle y habite ou non, elle a le droit de se dire chez elle, quel que soit le titre juridique de son occupation et l’affectation donnée aux locaux » (Crim. 31/01/1914).

D’ailleurs, la Cour de Cassation a considéré qu’une cour d’immeuble non close n’était pas un domicile, qu’a contrario une cour d’immeuble close doit être considérée comme un domicile (Crim. 26/09/1990).

En l’espèce, pour accéder à la cour d’un des mis en cause, les policiers ont dû franchir la première porte d’entrée de l’immeuble, puis un couloir, puis une seconde porte qui ouvre sur cette cour où se situe l’entrée du domicile.

Dès lors, l’interpellation a eu lieu dans un lieu privé assimilé au domicile privé.

Dans ces conditions, hormis les situations énoncées par l’article 59 du Code de procédure pénale, les policiers ne pouvaient pas pénétrer dans la cour intérieure de l’immeuble entre 21 heures et 6 heures.

De surcroît, même en cas d’enquête de flagrance, l’article 67 du Code de procédure pénale ne permet pas de déroger à l’article 59.

Or, au moment où les policiers se sont introduits dans le domicile, il était 22h17.

En conséquence, l’interpellation des deux prévenus était illégale car elle s’est déroulée dans des conditions de violation de l’article 59 du Code de procédure pénale, qui est d’ordre public.

Enfin, la garde à vue notifiée au moment de l’arrestation ne saurait  être considérée comme légale et devait être annulée pour non-respect de l’article 59 du Code de procédure pénale.

C’est ce qu’a conclu le Tribunal Correctionnel en annulant 22 procès-verbaux sur 26.

Isabelle OGER-OMBREDANE
Spécialiste en droit pénal